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Né en 1903, le tour de France a attendu 1951 pour visiter le Lot !
Les deux premières éditions du début du XXe siècle relièrent les principales villes du pays en six étapes (Paris, Lyon, Marseille, Toulouse, Bordeaux et Nantes). Le premier Tour traverse ainsi Montauban lors de la 4e étape Toulouse / Bordeaux. Mais il faut attendre 1951 pour que le tracé de l’épreuve quitte le traditionnel parcours hexagonal adopté à partir de 1906. Le Tour suivait les contours de la France, il faisait alors littéralement ou presque le tour, justement du pays …
Pour une première intrusion loin des frontières nationales, le Lot eu l’honneur d’une visite, et quelle visite !
Je vous propose de conter à ma façon les quinze rencontres du Lot avec la grande épreuve. Vous y revivrez quelques événements marquants : 1951, 1976, 2004. D’autres années, moins connues, méritent tout de même un petit commentaire ! Vous serez sans doute étonnés de la prédominance d’une date lotoise pour la grande histoire du Tour : le 15 juillet.
2022 dérogera à cette date. Le grand cru est pourtant d’ores et déjà envisagé…
Quelle mouche a donc piqué Hugo Koblet ce dimanche 15 juillet 1951 ? Voulait-il marquer à jamais la première incursion du tour de France dans le Lot ? Toujours est-il que la mouche était incontestablement lotoise !
Sitôt franchi la rivière Dordogne, c’est à Lanzac très précisément qu’Hugo Koblet se détache d’un peloton nerveux, en compagnie du modeste Louis Deprez qui ne restera collé dans son sillage que durant quelques kilomètres.
L’étape ne s’y prête pas a priori, et pourtant, la chevauchée solitaire lotoise est entrée dans la légende de la grande boucle : 1 minute 15 secondes d’avance à Gourdon, 1 min. 35 à Salviac, 2 min. 30 à Frayssinet-le-Gélat, 2 min. 45 à Puy-l’Evêque, près de 4 min. à Fumel…
L’écart se réduit à 3 minutes à Villeneuve-sur-Lot, avant de remonter à 3 min. 30, puis de décroître à nouveau.
A l’arrivée, Hugo Koblet précède ses adversaires, fourbus et médusés, de 2 min. et 35 secondes. Face au vent, il aura bouclé seul 140 km à 39 km/h de moyenne. A l’arrivée, il déclenche son chronomètre avant de se recoiffer. Il faut dire que cinq jours plus tôt, les officiels s’étaient trompés d’une minute à son égard lors de l’étape de 85 km courue contre-la-montre !
Bartali, Coppi, Magni, Ockers, Robic, Bobet, Géminiani, les seigneurs de ces temps-là, ne peuvent que constater la supériorité du futur vainqueur du Tour 1951, à l’issue de plus de 100 km de chasse. Le commentaire de Géminiani est désormais inscrit dans toutes les bibles de la grande boucle : « C’est pas possible un coureur pareil. S’il existait deux Koblet, je changerais de métier immédiatement » !
Ce jour-là, Hugo Koblet hérite pour la postérité de son surnom : « le pédaleur de charme ». Pour l’histoire, retenez que ce coureur talentueux n’a bouclé intégralement qu’un seul Tour de toute sa carrière : en jaune à Paris ou rien !
Il disparaît en 1964, à l’occasion d’un accident de voiture inexpliqué.
Il ne devait rien se passer dans cette étape de fin de tour. Depuis le mémorable passage de 1951, le département du Lot n’a été visité qu’à deux reprises, pour des rencontres anecdotiques, sans événement à conter : à peine 30 km en 1963, entre Figeac et Maurs (Rik Van Looy fait toutefois un beau vainqueur à Aurillac), et 25 km entre Souillac et Les Quatre-Routes-du-Lot en 1973, en direction de Tulle.
Pour les coureurs de la 19e étape, le calme précède la dernière difficulté du Tour 1976. Ils ont rendez-vous avec le Puy-de-Dôme le lendemain. Lucien Van Impe va gagner la course. Et pourtant, un champion joue de l’accordéon à l'arrière du peloton. Tu t’échappes, je recolle…
Il s’agit de Bernard Thévenet, vainqueur de l’année précédente, le tombeur du cannibale Eddy Merckx. Malade, Thévenet met le pied à terre à Martel et abandonne la course.
Il reviendra l’année suivante pour conquérir son second succès dans l’épreuve.
C’est Figeac qui aura les honneurs du premier départ d’une étape depuis le Lot, pour les 75 ans du Tour, ce jeudi 13 juillet 1978 : au programme, une cinquantaine de km en passant par Cardaillac, Sainte-Colombe (Rouqueyroux), Latronquière et Sousceyrac, avant la traversée du Cantal et du Puy-de-Dôme pour rejoindre la station de Super Besse.
Malgré un parcours propice aux attaques, dont celle du corrézien Alain de Carvalho, il ne se passe rien de particulier. L’histoire retiendra toutefois que Bernard Hinault, débutant dans le Tour, a orchestré une manifestation au sein du peloton la veille à Valence-d’Agen, les coureurs mettant pied à terre peu avant l’arrivée, pour protester contre les nombreux transferts.
Le 12, ils sont arrivés tard à Toulouse. Cette grogne explique le peu d’empressement à batailler en cette veille de 14 juillet où ils devront affronter le Puy-de-Dôme, avant de se diriger vers les Alpes.
Les connaisseurs se souviendront également qu’en 1978, Bernard Hinault remporte son premier succès dans l’épreuve, après l’épisode tragi-comique de la mise hors course du belge Michel Pollentier, pris en flagrant délit lors d’un contrôle anti-dopage. Il était muni d’un appareil destiné à délivrer des urines qui ne lui appartenaient pas.
Mais ceci ne s’est pas passé dans le Lot !
La 10e étape du tour 1994 fait la part belle aux départements de la Dordogne et du Lot, qui se partagent à parts égales les 160 km du parcours.
Dès le départ de Bergerac, la bataille fait rage. Les hostilités sont lancées par le champion de France, Jacky Durand. Une échappée de cinq coureurs se forme dans son sillage. Gianluca Bortolami, bien placé au classement général, a suivi le mouvement. Les équipiers de Miguel Indurain, maillot jaune depuis la veille, régulent l’allure d’une étape qui sera couverte à plus de 44 km/h de moyenne en passant par Gourdon et Labastide-Murat. Echappé dans la vallée du Vers, c’est un éclatant maillot bleu, blanc, rouge qui triomphe en solitaire en haut du boulevard Gambetta.
Repartant de Cahors le lendemain, le peloton musarde en direction de Montcuq et des Pyrénées, où Luc Leblanc débordera Miguel Indurain au sprint en haut d’Hautacam, quelques semaines avant de devenir champion du monde…
Quant à Jacky Durand, les routes du Lot l’inspireront à nouveau quatre ans plus tard. Le 19 juillet 1998, il remporte l’étape Brive-Montauban, après avoir traversé Salviac, Cazals, Montcléra, Frayssinet-le-Gélat et Montcabrier, au terme d’une échappée ayant vu le jour… juste à l’entrée du département (Salviac) bien entendu !
Est-ce pour rappeler le 15 juillet 1951 que les organisateurs ont coché le 15 juillet pour proposer 120 km de parcours lotois au menu de l’étape qui relie Brive à Villeneuve-sur-Lot ?
Un beau bazar s’engage dès le départ, 15 juillet lotois oblige, suivie d’une revue d’effectif des vingt-huit échappés afin de vérifier l’absence de danger pour le maillot jaune Bjarne Riis, futur vainqueur de cette édition. Une petite castagne dans la rampe en sortie de Carennac, direction Miers, pour permettre à six coureurs de s’extirper. Après un premier passage du tour de France à Rocamadour, les six guerriers rejoignent Villeneuve un par un, après avoir bouclé les 176 km à 45 km/h de moyenne. L’histoire n’a pas retenu le nom du vainqueur italien : Massimo Podenzana. Elle élira en revanche Bjarne Riis comme l’un des plus grands « champions » dopés à l’EPO.
Bien que située en fin de tour de France, à cinq jours du terme, la 16e étape Castelsarrasin – Sarran est agitée. Il ne peut en être autrement alors que le département va être traversé du sud au nord sur plus de 100 km.
La première heure de course est extrêmement rapide, les attaques se multipliant. Le lotois Laurent Roux occupe la tête pendant 8 km avant l’entrée dans le département. Même Jan Ullrich essaye de troubler la quiétude de Lance Amstrong, promis à son troisième sacre.
Mais la relation du Lot avec le Tour est contractuelle : pas question de s’y ennuyer !
Entre Lalbenque et Laburgade, un groupe de six coureurs, bientôt rejoint par un septième, tente sa chance. Au passage de la côte des Vitarelles (commune d’Esclauzels), le peloton laisse filer. Il rejoindra Sarran plus de 25 minutes après Jens Voigt, valeureux vainqueur. Cinq malheureux concurrents du peloton ne franchiront pas la ligne d’arrivée, victimes d’une grosse gamelle à Tulle, avec fracture du crâne pour le perpétuel malchanceux suisse Sven Montgomery (dont le frère décédera à vélo deux ans plus tard).
Après Cahors 10 ans plus tôt, le département accueille une deuxième arrivée d’étape. C’est Figeac qui est à l’honneur… un 15 juillet, bien entendu !
Pour fêter l’événement comme il se doit, c’est un lotois qui arrive seul devant au Foirail : David Moncoutié qui demeure à ce jour le dernier local vainqueur d’une étape du tour de France.
Il a évidemment coché cette étape et dès le départ de Saint-Flour, David Moncoutié suit avec vigilance tous les mouvements de course. Plus de 47 km sont parcourus dans la première heure sur les difficiles routes du Cantal. C’est vers Mur-de-Barrez que deux coureurs espagnols réussissent à lancer le bon coup, accompagnés de l’inévitable Moncoutié, qui leur faussera compagnie 100 km plus loin, dans la côte de Saint-Jean-Mirabel, à 9 km de Figeac.
Déchaîné sur des routes qu’il connaît par cœur, le lotois relègue les deux espagnols à plus de 2 minutes. Il aura le temps de savourer son plus beau succès, le peloton rejoignant la cité de Champollion 6 minutes plus tard. Au sein de ce dernier, le jeune Thomas Voeckler, 25 ans, va boucler sa première semaine tout de jaune vêtu.
C’est la deuxième fois qu’une étape du tour de France s’élance de Cahors (la troisième fois pour le Lot). A deux jours de l’arrivée à Paris et à la veille d’un contre-la-montre décisif pour départager Alberto Contador et Cadel Evans, les concurrents de la 18e étape s’élancent en direction d’Angoulême (35 km dans le Lot), sans autre enjeu que celui d’une victoire sur une étape de transition.
C’est encore une fois dans le parcours lotois de l’étape que se déroulent les points marquants de la course : après 15 km, quatre coureurs se détachent. Peu après Lavercantière, un labrador noir fait chuter le français Sandy Casar et le belge Frederik Willems. L’image a fait le tour du monde. Le premier nommé rejoint l’échappée, au contraire du second, et remporte enfin, à 28 ans, une étape de la grande boucle (Il avait déjà terminé à trois reprises en 2e position).
Cette victoire est considérée pour beaucoup d’observateurs spécialisés comme la réparation d’une injustice. Grand talent du cyclisme français du début des années 2000, comme ce fut le cas pour David Moncoutié, il est probable que Sandy Casar n’a jamais lutté à armes égales avec certains champions survitaminés de son époque.
Qui se souvient aujourd’hui que le dernier départ d’une étape du Tour dans le lot (le quatrième de l’histoire) s’est déroulé à Figeac en 2008 ? En quelques minutes (5 km dans le Lot), oubliant leurs obligations d’animation dans notre département, les coureurs ont rejoint l’Aveyron après avoir franchi la rivière Lot au pont de La Madeleine. L’histoire a retenu de cette journée que le jeune anglais Mark Cavendish, 23 ans à l’époque, remporte sa deuxième victoire d’étape sur le Tour au sprint à Toulouse.
Il manquera ensuite de peu le grand chelem pour les passages effectués dans le Lot :
C’est toujours en Occitanie, à Carcassonne, qu’en 2021, Mark Cavendish remporte son 34e bouquet sur l’épreuve, égalant le record de victoire d’étapes d’un certain Eddy Merckx !
Nous pensions lui donner rendez-vous en haut du boulevard Gambetta le 22 juillet prochain à Cahors, mais il n’a finalement pas été sélectionné par son équipe pour la 109e édition du Tour de France !
Les archivistes - qui ont plus d'un tour dans leur sac - ont dressé pour vous
la liste exhaustive des différents passages du Tour dans le Lot, avec les localités traversées :
15 juillet 1951 – Brive / Agen
Cressensac / Souillac / Lanzac / Payrac / Le Vigan / Gourdon /
Pont-Carral - Salviac / Cazals /Montcléra / Frayssinet-le-Gélat / Pomarède / Puy-l’Evêque / Duravel / Soturac
5 juillet 1963 – Toulouse / Aurillac
La Madelaine / Figeac / Viazac / Bagnac-sur-Célé
19 juillet 1973 – Sainte-Foy-la-Grande / Brive
Souillac / Martel / Les Quatre-Routes-du-Lot
15 juillet 1976 – Sainte-Foy-la-Grande / Tulle
Souillac / Martel / Vayrac / Bétaille / Puybrun / Bretenoux / Biars-sur-Cère
13 juillet 1978 – Figeac / Super-Besse
Départ de Figeac / Planioles / Cardaillac / Rouqueyroux / La Vitarelle /Latronquière / Sénaillac-Latronquière / Sousceyrac
12 juillet 1994 – Bergerac / Cahors
Gourdon / Le Vigan / Séniergues / Montfaucon / Labastide-Murat / Saint-Sauveur-la-Vallée /
Saint-Martin-de-Vers / Vers / Lamagdelaine / Laroque-des-Arcs / Cahors, boulevard Gambetta
13 juillet 1994 – Cahors / Hautacam
Départ de Cahors / Montcuq
15 juillet 1996 – Brive / Villeneuve-sur-Lot
Les Quatre-Routes-du-Lot / Condat / Saint-Michel-de-Bannières / Vayrac / Bétaille / Carennac /
Miers - Alvignac / Rocamadour - L'Hospitalet / Calès / Payrac / Gourdon / Salviac / Cazals / Montcléra / Frayssinet-le-Gélat
19 juillet 1998 – Brive / Montauban
Salviac / Cazals / Montcléra / Frayssinet-le-Gélat / Montcabrier / Saint-Martin-le-Redon
25 juillet 2001 – Castelsarrasin / Sarran
Montdoumerc / Lalbenque / Laburgade / Aujols / Saint-Géry / Vers / Cours / Saint-Martin-de-Vers / Saint-Sauveur-la-Vallée /
Labastide-Murat / Le Bastit / Gramat / Lavergne / Saint-Jean-Lespinasse / Bretenoux / Biars-sur-Cère
15 juillet 2004 – Saint-Flour / Figeac
Bagnac-sur-Célé / Saint-Jean-Mirabel / Figeac, boulevard du Colonel Teulié
27 juillet 2007 – Cahors / Angoulême
Départ de Cahors / Mercuès / Catus - Salvezou / Lavercantière / Dégagnac / Pont-Carral
12 juillet 2008 – Figeac / Toulouse
Départ de Figeac / La Madeleine
12 juillet 2011 – Aurillac / Carmaux
Bagnac-sur-Célé / Viazac / Figeac / La Madeleine
20 juillet 2012 – Blagnac / Brive
Castelnau-Montratier / Lhospitalet / Cahors / Saint-Pierre-Lafeuille / Pélacoy /
Les Moulins de Lamothe / Frayssinet / Payrac / Lanzac / Souillac / Cressensac
- Versements du Cabinet du préfet : 1 W 470 ; 1209 W 351 et 519 ; 1260 W 29 ; 1282 W 81
- Versements du service des sécurités : 1490 W 1-4 ; 1562 W 57 ; 1615 W 14 ; 1909 W 82
- Versement du service communication. Photothèque du Conseil général : 1248 W 28/180
- Versement de la subdivision de Figeac : 1698 W 1, 28 et 29
- La Dépêche du Midi (1 PER 35)
- La Vie quercynoise (1 PER 68)