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Voici quelques recettes extraites d’un cahier de préparations (94 J 840) prévues pour un usage industriel dans les années 1910/1920, provenant du fonds de la conserverie Chambon et Marrel (1860-1990). La manufacture familiale de Souillac produit dans le Lot des recettes à base de truffes, ainsi que des conserves polyvalentes dans une usine-annexe à Bordeaux à base de légumes, fruits, viandes ou poissons cuisinés.
Le cahier de préparations ici présenté provient vraisemblablement de l’usine-annexe bordelaise.
A vos calculettes pour adapter les quantités à vos besoins !
Au menu : écrevisses au naturel, pâté des familles, petits pois des familles, fricassée de poulet, flan Victoria.
En prime, des conseils pour la préparation des foies pour pâtés, l’utilisation de l’extrait de café dans les desserts et pour finir, la recette des quatre épices.
Bon appétit !
« Faire bouillir de l’eau assaisonnée de thym, laurier, poivre en grain, piment et sel. Laissez bouillir quelques minutes. Plonger les écrevisses et les laisser cuire environ 15 minutes. Mettre en boîtes en ajoutant un peu d’eau de cuisson.
Ebullition : 2 heures à 112 degrés ».
75 kg. de cœurs de bœuf congelés, plaque fine
25 kg. de gras de porc passé à la grosse plaque
5 kg. de couennes blanchies 30 minutes à la bassine, plaque fine passée deux fois
750 gr. d’ail
500 gr. d’échalottes
300 d’épices : thym, laurier, muscade, basilic, girofle, cannelle.
100 gr. de poivre
2 kg. de sel
4 kg. de fécule
« Le tout passé à la machine.
118 boîtes ovales blanc 75 gr. nets
98 boîtes rondes Keradec 80 gr. nets.
Les 98 rondes étaient un peu pleines, on a réduit à 70 gr.
Ebullition : 2 heures à 112 degrés ».
« Pour 80 litres d’eau, on met dans un sac, environ
1 kg 800 d’oignons
1 kg 600 de laitues
60 gr. de thym
70 gr. d’herbettes
60 gr. de ciboule
6 kg de sucre
1 kg de sel.
Laisser bouillir le sac pendant 10 à 15 minutes, plongez les pois dedans.
La cuite se compose de 60 kg de grains environ, laisser cuire
Extra : 5 min
Fins : 6 min
Mi-fins : 7 min
Moyens : 8 min
Gros : 9 min.
Emboîtage : 30 minutes la cuite à 112 degrés.
C’est au chef de fabrication à voir s’il y a lieu d’augmenter la cuisson vers la fin de la saison ».
Essai du 29 juin 1929 de pois ragoutés pour Mme Pouga
Pois [petits pois] : 3 kilos
Fines herbes : 15 gr.
Herbettes : 5 gr.
Thym : 2 gr.
Sel : 0.20 gr.
Sucre : 400 gr.
7 verres d’eau.
« Mettre dans une casserole une bonne cuillère de graisse, aussitôt fondue, mettez les pois. Les laisser suinter à feu doux pendant 1 heure en les faisant sauter doucement à seule fin qu’ils ne se [froissent ?] pas à la casserole.
Mettez-en même temps 3 cœurs de laitues et les herbes, composées d’un bouquet, dites plus haut. Mettez ensuite l’eau dite plus haut et laisser bouillir 1 heure en ajoutant le sel et le sucre.
D’autre part, vous aurez fait revenir des oignons à la graisse et le jambon. Emboîtez avec un oignon moyen ou deux petits par boîte et 7 morceaux de jambon.
Ebullition : 1 heure à 112 degrés.
Trouvé très bien par Mme Pouga ».
« Enlevez les membres et le blanc de vos poulets de façon qu’il ne reste que la carcasse. Faites-les rôtir sans être trop roux, mais assez cuits pour éviter la fermentation.
Emboitez vos morceaux en les répartissant le plus possible.
Faites revenir à la graisse des petits oignons d’un beau blond. Garnissez vos boîtes.
Jutez avec jus suivant : mettez dans une casserole un peu de graisse, ajoutez-y un 1/3 de bouillon, un ¼ de vin blanc et un jus de citron, laissez bouillir un bon moment et garnissez vos boîtes aux ¾. Faites le plein avec de la bonne graisse.
Notre fabrication : 24/11/1908 ».
« Faire bouillir le lait avec le sucre et l’arôme que l’on veut pendant 4 heures environ.
Il faut verser le lait pas trop chaud sur les œufs battus à l’avance en remuant jusqu’à ce qu’il soit tout vidé. Verser aussitôt dans les moules ou boîtes préparées avec du caramel.
Pour faire 58 boites et demi, nous avons employé
90 œufs
15 litres de lait
15 bâtons de vanille
1 cuillère à café de fécule délayée dans un peu d’eau.
Ebullition : 40 minutes à l’air libre
Avril 1910 : noté. Notre fabrication du 12/13/1914 ».
« Après avoir nettoyé les foies, c’est-à-dire enlevé le fiel et la graisse. Coupez-les en cinq ou six morceaux. Placez-les dans un récipient muni d’un robinet dans le fond, versez dessus et arrosez souvent avec la composition suivante :
1 litre de cognac
0.250 d’huile
0.300 de sel
0.100 d’épices composées
4 échalotes coupées
Du thym et du laurier.
Ces proportions sont pour 30 kilos de foies environ ».
« Crème au café. Pour un litre de lait bouillant, on mettra deux ou trois cuillerées à café d’essence ; on aura soin de mélanger cette essence avec les jaunes d’œufs qui entrent dans la composition de la crème, juste au moment de mettre au four pour la cuisson.
Pour œufs à la neige, glaces, petits fours, bonbons, etc., chaque opérateur devra apprécier le moment favorable pour ajouter l’essence de café ; il faut seulement se rappeler qu’il est important de l’ajouter le plus tard possible, afin d’éviter l’altération de l’arôme par une cuisson trop prolongée ».
Poivre blanc 1.000
Piment des Indes gris 0.380
Poivre de Cayenne rouge 0.010
Poivre jaune séché (pepparone) 0.100
Paprika de Hongrie 0.100
Macis ou fleur de muscadier 0.150
Muscade râpée 0.100
Girofle clou 0.080
Cannelle 0.080
Carry en poudre 0.080
Coriandre 0.040
Thym en branches 0.040
Laurier 0.040
Romarin 0.040
Marjolaine 0.040
Sarriette 0.040
Basilic 0.040
Vous pèserez d’abord les plantes, puis vous les effeuillerez. Ensuite, ne piler pas les brindilles de laurier, ni de thym ; épluchez seulement les feuilles odorantes. Faites sécher à l’étuvée dans des sacs en papier fermés et conservez une fois sec dans des bocaux et serrés, bien bouchés afin de concentrer l’arôme.
Ne faites vos quatre épices qu’au fur et à mesure de vos besoins.
Pour sel épicé, par chaque kilo. de sel, 60 gr. d’épices ».
Pour en savoir plus sur l’entreprise : voir l’exposition virtuelle qui lui a été consacrée.
Soyez curieux et inventif en apprenant à torréfier le café et en découvrant la technique de fabrication des plaques de chocolat à Cadix en 1928 grâce à deux pièces isolées des archives privées.
« Laver le café à l’eau froide jusqu’à ce qu’elle reste limpide. Ôter tous les grains qui surnagent et qui, par cela même, sont avariés. Faire sécher à l’air après avoir essuyé dans un linge, le café ainsi lavé.
Le brûler en très petite quantité à la fois (de manière qu’il n’y ait guère plus de deux couches superposées) dans une casserole très large et très peu profonde en terre. Quand il commence à blondir, le saupoudrer d’une pincée de sucre en ayant soin de continuer à le remuer avec une cuillère en bois pendant tout le temps qu’il grillera. Lorsqu’il sera plus que blond (mais non à demi carbonisé), le jeter tout chaud sur le marbre, afin de concentrer, par ce changement brusque de température, toute l’huile essentielle qui, d’ordinaire, se volatilise, et le laisser ainsi étendu jusqu’à son entier refroidissement avant de le moudre. Pour l’infusion de ce café dans les cafetières à filtre ou autres, employer de l’eau dans laquelle on aurait fait crever de l’avoine lavée préalablement comme il a été dit pour le café ».
Pièce isolée : J 2740.
Au dos du feuillet double, il est écrit de la même écriture : « Saint-Céré, section de Saint-Paul-de-Vern ». Le scripteur de la recette avait probablement des fonctions publiques officielles. Le document a en effet été trouvé dans une liasse de la série R lors du retraitement des fonds modernes de la Préfecture concernant le recrutement de l’armée.
Nous n’avons malheureusement aucun renseignement sur une date approximative de rédaction.
Cette fois, nous avons une date : 1928. Un lotois, vraisemblablement un notaire, du moins un homme de loi, a consigné dans un petit carnet de « notes diverses » (ouvert par quelques affaires d’argent et quelques notes personnelles) une excursion en Espagne. On peut notamment lire la liste des villes et villages traversés entre Cadix et Bayonne entre le 23 septembre et le 21 novembre 1928. A la suite de quelques notes sur la cathédrale de Séville et la cité de Cadix, on peut lire un long descriptif de la fabrication du chocolat en cette ville.
Pièce isolée : J 2596.
« Le rouleau est demi cylindrique ; la partie plane glisse sur la pierre.
La racloire est en fer comme celle des boulangers ; elle a 4 pouces de large, 6 pouces de hauteur. Elle est destinée à transporter le cacao broyé sur la pierre.
Un couteau à lame flexible sert à nettoyer le dessus de la pierre.
La pierre doit constamment être soumise à une chaleur modérée, à peu près celle d’un poêle légèrement chauffé. On n’en fait point usage que quand elle a acquis ce degré de chaleur. La chaleur s’entretient par un réchaud qu’on place [sous] la pierre et qu’on retire successivement.
Le cacao livré par le marchand est d’abord passé à un crible fin à treillis de fer - ou sur un crible de parchemin - pour le nettoyer de la poussière, des pierres ou autres substances étrangères.
Ensuite on torréfie le cacao dans un chaudron à large bord et le chaudron doit préalablement contenir 2 ou 3 litres de sable fin fortement chauffé avant d’y mêler le cacao.
Le cacao se torréfie à un feu très ardent et doit sans cesse être remué dans le sable avec une spatule ou palette de bois. Quand le cacao commence à pétiller, légèrement, comme les grains de café qu’on torréfie, on retire le chaudron de dessus le feu. Il faut éviter avec soin de brûler l’amande du cacao. Elle doit seulement être cuite ou durcie, comme l’amande dans une dragée.
Le sable a pour objet d’empêcher que le cacao ne se ramollisse et ne colle contre les parois du chaudron. On passe ensuite au tamis pour élaguer le sable. On ne torréfie à la fin que 10 à 12 livres de cacao.
Le cacao après avoir été purgé du sable et pendant qu’il est encore chaud est enfermé soigneusement dans un sac et bien couvert, ainsi qu’on le pratique pour le café quand il vient d’être torréfié. Il y demeure jusqu’à parfait refroidissement, après quoi il est mis en œuvre ordinairement un jour après.
Le cacao doit alors être broyé avec un rouleau et réduit en fragment de la grosseur d’un petit grain de café, plus ou moins, ce qui se pratique en disposant le cacao sur une table. Jusqu’ici l’écorce n’a pas été séparée de l’amande, voici comment il faut y procéder :
Le cacao ainsi broyé et mis dans un plateau de bois ou d’osier de forme allongée, ayant deux anses, et il est vanné dans un courant d’air qui en disperse complétement l’écorce. Ainsi purifié, il est [rassemblé ?] et mis à côté de la pierre où l’ouvrier doit opérer.
Cet ouvrier le reprend avec la racloire pour capturer la quantité convenable sur la courbure de la pierre, mais principalement à la partie supérieure où le rouleau le presse pour le réduire en pâte qui se produit à force de frottement. Et cette pâte est ensuite amenée au bas de la courbure de la pierre d’où on la fait tomber dans un bassin de bois, saupoudrée de cassonade passée au tamis afin que la pâte n’adhère point à ses parois.
Quand le cacao est de bonne qualité, la pâte se forme promptement et elle est de la consistance du miel en été. Si on ne l’obtenait pas de cette consistance, on la remettrait une seconde fois sur la pierre.
Le cacao de Caracas qui est le meilleur, après avoir été torréfié, a son amande d’une couleur rougeâtre. La couleur est […] pour celui de Guyaquil qui est d’une qualité très inférieure.
En même temps qu’on prépare la pâte, un autre ouvrier dispose ce qui doit y être ajouté. La cassonade est d’abord passée au tamis après qu’elle a été bien pulvérisée. Elle est ensuite chauffée légèrement dans le même chaudron qui a servi pour torréfier le cacao. On l’y remue sans discontinuer avec une palette de bois. Le chaudron est sur un feu très modéré. La cassonade est enlevée pour partie, sans retirer le chaudron du feu, pour être jointe à la pâte dans le bassin de bois où celui-ci a été recueillie, par-dessus et par-dessous. On pétrit ce mélange dans le bassin, ce qui donne plus de consistance à la pâte qui est ensuite portée dans le chaudron sur le feu. On pétrit de nouveau avec la main jusqu’à ce que la cassonade soit bien divisée [sic] et incorporée. C’est dans ce moment qu’on ajoute encore la cassonade réduite en poudre très fine, contenant si l’on veut de la vanille et on reproduit de nouveau.
Le feu doit, a-t-on dit, être très modéré pour que la pâte ne se ramollisse pas trop. Ce mélange étant bien opéré, on retire la pâte du chaudron pour la porter de nouveau près de la pierre où l’ouvrier la reprend pour la passer de nouveau sur la pierre et elle n’exige actuellement qu’un léger frottement pour fournir une pâte qui doit être de la consistance de la pâte du pain au moment de mettre au four. Au fur et à mesure qu’on la forme et qu’elle est recueillie dans le bassin de bois, elle est reprise à pleines mains et transportée sur une table où on la divise en morceaux de poids égaux qui sont ordinairement de ½ livre. Chacun de ces morceaux est jeté dans une moule de fer blanc. Le nombre de ces moules doit suffire pour recevoir toute la pâte fabriquée dans la journée.
On place un certain nombre de ces moules renfermant la pâte sur une planche qui ordinairement est pour en contenir deux sur sa largeur et cinq sur la longueur et d’où ils ne peuvent glisser, y étant retenus par une bordure qui encadre la planche. Ces moules ainsi disposés, on agite vivement la planche sur une table, ce qui ramollit la pâte et l’a fait étendre uniformément au fond des moules. On la comprime même avec le plat de la main pour qu’il ne s’y forme pas de parties vides. On passe ensuite un couvert en fer blanc successivement sur tous les moules pour y laisser sur la pâte l’empreinte des divisions ou dessins qu’on veut faire.
Les moules et le chocolat qu’ils renferment se déposent dans un endroit frais pour le refroidissement. Le lendemain, le chocolat est retiré pour qu’il n’y ait aucune adhérence aux parois des moules. Le refroidissement est indispensable pour préserver de cette adhérence ; aussi l’hiver est plus favorable pour la fabrication du chocolat.
Toute la fabrication s’opère dans la même journée, mais c’est la veille qu’on torréfie le cacao. On sait pour cela qu’un homme et son manœuvre peuvent mettre en œuvre 25 livres de cacao par jour. La pâte diminuerait et ne serait pas de bon emploi si on faisait l’opération sur deux jours.
Si le cacao avait été torréfié longtemps avant la manipulation, on aurait plus de peine à le réduite en pâte. Quand il a cette dureté, on met le cacao broyé et nettoyé dans un mortier, on le ramollit par le choc du pilon. Cette main d’œuvre [pour manœuvre] est même avantageuse dans toutes les circonstances.
La cassonade la plus nacrée est la meilleure, ce n’est donc pas la plus blanche dont il faut faire usage. La cassonade tout à fait brune serait trop humide et peut-être donnerait-elle mauvais goût au chocolat. Il est essentiel de s’assurer qu’elle ne contient point de sable.
La cannelle est achetée en écorce. On la pulvérise dans un mortier bien recouvert. Si on mêle de la vanille à la cannelle, il faut la diviser en petits morceaux avec un couteau et on la pulvérise en même temps que la cannelle.
Il faut deux ouvriers pour la manipulation. Le plus fort fabrique la pâte pendant que l’autre broie, nettoie et vanne le cacao, qu’il chauffe le sucre, pulvérise la cannelle ; ce dernier est le manœuvre de l’autre ouvrier.
En France, on mettait des farines dans la pâte de cacao. Les débris de biscuits […] sont inutiles et ne servent qu’à faire mousser le chocolat au moment de le prendre. D’ailleurs, ces mélanges font que le chocolat n’est pas de garde, attendu qu’ils font engendrer des vers qui rongent le chocolat ».
Le carnet contient par ailleurs la recette pour faire de l’eau de Cologne et un remède contre l’empoisonnement par des aliments ayant séjournés dans des ustensiles en cuivre.