Accueil > Découvrir : Offre culturelle > Nuits de la lecture 2025 > 15 avril 1784, château de Caïx. Testament de J.-J. Lefranc,
Le 15 avril 1784, Jean-Jacques Lefranc, marquis de Pompignan, seigneur de Caïx et du Touron, dicte son testament en son château de Caïx en Quercy devant Guilhou, notaire royal : « dangereusement malade quoique sain ». Après avoir recommandé son âme à Dieu selon l’usage, le marquis lègue à chacun de ses domestiques, servantes et cuisinier, une somme d’argent et ou une pension viagère. Tous ses gens de maison – tant de Pompignan que de Caïx – devront être nourris pendant un mois après son décès « aux dépens de sa succession ». Les pauvres, de leur côté, se verront distribuer le jour du décès – là encore selon l’usage – une somme d’argent. Enfin, Lefranc de Pompignan nomme et institue son héritier universel et général « messire Jean George Louis Marie Lefranc de Pompignan », son fils, à charge pour lui de « faire dire trois mille messes basses de requiem » pour le repos de son âme « dans l’an de son décès, savoir mille à Pompignan, mille à Caïx et mille au Touron » (ou Thouron)**. Prévoir un certain nombre de messes pour le « repos de l’âme » n’a rien d’étonnant – cette précaution vise à éviter un séjour trop long en purgatoire – mais la quantité, elle, est surprenante.
Dans le codicille* établi cinq jours plus tard, le 20 avril, le marquis de Pompignan confie à son frère, archevêque de Vienne, la tâche de purger sa bibliothèque « de tout ce qui pourrait être contraire à la religion et aux bonnes mœurs » – d’où peut-être les 3000 messes – avant de la remettre à son fils héritier. Son secrétaire se voit également attribuer une pension viagère.
Six mois plus tard, Lefranc de Pompignan s'éteint en son château de Pompignan, le 1er nov. 1784.
* Codicille : dispositions modifiant un testament antérieur ou contenant des précisions ou de nouvelles dispositions qui ne se trouvaient pas dans l'acte d'origine.
** Il s’agit vraisemblablement « del Thoron » ou Thouron à Labouffie. La communauté de Labouffie et de la Madeleine d’Aussac (aujourd’hui en Tarn-et-Garonne), devenue brièvement municipalité à la Révolution, a été réunie à celle de Saint-Paul-de-Loubressac en 1801. La commune prend alors le nom de Saint-Paul-Labouffie, elle est à nouveau dénommée Saint-Paul-de-Loubressac en août 1943.
1 Au nom de Dieu, sçachent touts présentz
2 et à venir que, ce jourd’huy quinzième avril mil sept
3 cens quatre vingtz quatre, au chasteau de Caix en
4 Quercy, avant midy, devant le notaire royal et témoins
5 soussignés, a compareu haut et puissant seigneur
6 messire Jean Jacques Lefranc, marquis de Ponpignan,
7 seigneur de Caix et du Touron, entien [ancien] premier président
8 de la Cour des Aydes de Montauban, conceiller d’honneur
9 au Parlement de Toulouse et l’un des quarante de
10 l’Académie françoise, lequel, se trouvant dangerusement
11 malade, quoique sain de ses sens ainsy qu’il a pareu à
12 nousdit notaire et témoins, nous a dit vouloir faire son
13 testament en la forme qui suit : en premier lieu, il
14 a recomandé son âme à Dieu, le priant très instament
15 qu’il luy plaise après son décès la recevoir dans son
16 repos éternel pour qu’il le puisse louer et glorifier
17 à jamais, s’en raportant pour ses honneurs funèbres
18 à la sage conduitte de son héretier bas nommé et, disposant
19 de ses biens, ledit seigneur testateur a dit qu’il donne et
20 lègue à Saint-Jean, son entien domestique et son garde-bois
21 à Ponpignan la somme de cinq cens livres une fois
22 payée, et cinq cens livres de pention viagère, ensenble
23 la somme de deux cens livres à chacune de ses quatre filles
24 pour les marier ; plus donne et lègue à Jean Piéroutou
25 filz audit Saint-Jean, la somme de deux cens livres de pention
26 viagère, si ce dernier survit à son père au service dudit
27 seigneur testateur ; plus donne et lègue ledit seigneur
28 testateur à la nommée Jeanne, sa servante à Ponpignan
29 la somme de deux cens livres de pention viagère ;
30 plus donne et lègue ledit seigneur testateur à Jeanne Marmié
31 sa servante, la somme de quatre cens livres de pention
32 viagère, ensemble quatre quartes de bled froment, une
33 quarte seigle et une quarte millet, payable annuelement
34 pendant et durant la vie de ladite Marmié ; plus donne
35 et lègue ledit seigneur testateur à Paul Lanbert, son /
1 son domestique, la somme de quatre cens livres de
2 pention viagère, ensenble la somme de quatre cens
3 livres une fois payée, avec sa garde-robe de Paris, de
4 Pompignan et de Caix ; plus donne et lègue ledit
5 seigneur à Baptiste Dufor, son domestique, la somme
6 de trois cens livres une fois payée, et la somme de
7 deux cens livres de pention viagère ; plus donne et
8 lègue ledit seigneur testateur au sieur Boyer, son cuisinier,
9 la somme de trois cens livres de gages une fois payée,
10 et la somme de deux cens livres de pention viagère ;
11 plus donne et lègue ledit seigneur au nommé Antoinne,
12 son domestique, la somme de cens livres une fois payée
13 et cent cinquante livres de pention viagère, à la
14 charge par luy de rester au service dudit seigneur
15 testateur sur le pied des autres domestiques, sans que
16 pour cella l’on augmente ni diminue son traitement ;
17 plus donne et lègue ledit seigneur testateur à
18 la nommée Margueritte, son autre servente, la
19 somme de cent cinquante livres de pention
20 viagère, voulant et entendant en outre ledit
21 seigneur testateur que toutz ses domestiques tant de
22 Ponpignan que de Caïx soient nourris pendant un
23 mois après son décès aux dépends de sa succession ;
24 veut et ordonne de plus ledit seigneur testateur que
25 le jour de son décès il soit distribué aux pauvres
26 de Pompignan, du Touron et de Caix la somme de
27 trois mille livres, cent pistoles à chaqu’un de ces
28 trois endroitz ; plus donne et lègue ledit seigneur
29 testateur au sieur Royer qui l’a servy en en qualité de
30 secrétaire la somme de cinq cens livres de gages
31 quoique son honnoraire eut esté convenu à quatre
32 cens livres par an, outre le voyage de Paris par
33 la diligence ou toute autre voiture commode ;
34 et pour le surplus de ses autres biens, noms, voix,
35 droitz, raisons et actions quelconques de son bon /
1 gré, ledit seigneur testateur a de sa propre bouche
2 nommé et institué, nomme et institue son hérétier
3 universel et général messire Jean, George, Louis, Marie
4 Lefranc de Ponpignan, son filz et de dame Marie Antoinette Félicité
5 de Colincour, son épouse, à la charge par luy de luy
6 faire dire trois mille messes basses de requiem pour
7 le repos de l’âme du testateur dans l’an de son décès,
8 sçavoir est mille à Pompignan, mille à Caix, et
9 mille au Touron, et ce a dit ledit seigneur testateur
10 estre sa dernière volonté et disposition de ses biens,
11 cassant, révoquant et annullant toutes autres
12 dispositions qu’il pourroit avoir cy-devant faittes
13 contraires au présent et par exprès les legs pies [pieux]
14 y contenus, voulant que le présent soit son seul et
15 valable testament, dont ledit seigneur testateur
16 m’a requis luy rettenir acte, que je luy ay concédé,
17 leu et récité mot à mot dans son entier, présentz
18 à ce Mr Me Jean Marc Galdemar, vicaire du
19 présent lieu, Mr Me Barthélémy Silvestre, prêtre
20 et vicaire de Douelle, le sieur Pierre Pons, maître en chirurgie
21 du lieu de Calamane, le sieur François Belalbre, chirurgien
22 de Caix, le sieur Jean Pierre Canhac, estudiant, natif
23 de Castelfranc, habitant de Caix, et Guilhaume Marmié,
24 filz à Antoinne, mettayer dudit seigneur, signés après
25 ledit seigneur testateur de ce requis et moy.
Le Marquis de Pompignan, testateur ; Silvestre, prêtre ; Galdemar, vic ; Pons ; Belalbre ; Cagniac ; Marmié ; Guilhou, notaire royal
Contrôllé et insinué à Caors le 13 novembre 1784, reçu quatre cent soixante dix sept livres quinze sols suivant la notte ci-contre.